Bonjour à tous,
Je vous présente mon RETEX de mon embarquement à bord de la Frégate La Fayette. Ceci s'est effectué du 2 au 5 Mars 2010. Port d'attache : Toulon.
Grâce à une personne de ma famille actuellement Capitaine de Frégate dans la Royale, j'ai pu embarquer à bord d'un bâtiment de la Marine nationale. Contacté par la SRM à Paris, je devais initialement embarquer sur le PR Meuse (Pétrolier Ravitailleur) du 23 au 27 Février 2010. Le bâtiment ayant eu un problème technique, l'embarquement fût annulé. Finalement recontacté, un autre embarquement m'est proposé. Il s'agit de la FLF La Fayette (Frégate Légère Furtive), qui part en exercices, après quelques mois de non activités, en vue d'un nouveau déploiement en Océan Indien au large de la Somalie trois semaines plus tard. J'embarque donc sur cette frégate du 2 au 5 Mars 2010.
2 Mars. Départ de la Gare de Lyon. Je rencontre mon accompagnateur pour l'embarquement, un Aspirant en VOA, actuellement Physicien Nucléaire basé à Cherbourg. Nous échangeons quelques paroles de présentation avant de rejoindre nos voitures respectives, direction Toulon et sa base navale. Nous arrivons aux alentours de 17h30 à la base de Toulon. Accueilli à la gare par un Lieutenant de Vaisseau attaché aux relations publiques de la Marine, il fait un tour de la base pour me faire découvrir quelques bâtiments. J'ai pu apercevoir des FAA (Frégate Anti Aérienne), des FASM (Frégate Anti Sous Marine), un SNA (Sous Marin Nucléaire d'Attaque), le PR Meuse celui sur lequel je devais initialement embarqué, et d'autres, comme un bâtiment algérien actuellement en escale à Toulon. On finit donc par le quai où se trouvaient le La Fayette, ainsi qu'un bâtiment espion, l'Alizée. Nous montons à bord par la coupée, précédé du LV et de l'ASP. "Sur le bord!", cria un matelot, qui était à cette heure de quart, en se mettant au garde à vous pour saluer les deux officiers. Nous sommes donc laissés par le LV, au Major alors chef de quart à bord. Il nous présenta un peu le bâtiment à l'oral avant de nous montrer nos postes, là où nous allions dormir pendant 4 jours. Nous étions logés avec les OM (Officiers Mariniers), en poupe, en dessous du pont d'envol. La météo pour le lendemain est exécrable. La plupart des marins disent que l'on va être secoué... Pas très rassurant mais il faudra s'y faire. Levé du lendemain matin prévu pour 6h30, et appareillage prévu pour 7h45. Il faut se coucher tôt pour ne pas être trop fatigué.
3 Mars. Arrivée des derniers permissionnaires à 5h30, ce qui nous réveille dans les postes. On s'habille, on va prendre la douche, et ensuite direction le carré équipage pour le petit déjeuner. Très bien accueilli, les marins sont gentils. Avant d'appareiller, nous devons aller chercher nos TBB, la tenue que l'on portera pendant les 3 jours de l'embarquement. Vers 7h00 une diffusion indique "En raison des mauvaises conditions météorologique, l'appareillage est retardé à 8h30". Beaucoup sont sceptiques au départ dans ces conditions. Certains disent qu'il va y avoir énormément de malades, et d'autres disent qu'il va y avoir énormément de casse. Dehors, ça souffle. Le PA Charles de Gaulle, actuellement en mer en Méditerranée pour 2 mois, nous indique que le temps est mauvais. Une autre diffusion du PC sécurité, demande aux chefs de secteurs d'effectuer l'arrimage du matériel pour éviter au maximum la casse de matériel, comme les postes de télévisions, les ordinateurs, radios...etc. A 8h00, une autre diffusion indique le report du départ "En raison des mauvaises conditions météorologiques, l'appareillage est retardé à 9h30". Et ça ne sera pas le dernier report. Le départ sera finalement retardé et maintenu à 11h.
L'appareillage se fait par des remorqueurs jusqu'à arrivée en rade de Toulon où nous sommes donc lâchés et notre progression se fait donc grâce au quatre moteur diesel du bateau. On peut voir dès le départ que la mer se forme petit à petit, et que le vent souffle. Je quitte la passerelle pour me rendre au PC Sécurité dans le but d'assister à des séances d'exercices feu, et voie d'eau. La coordination des secours intervenants et du poste de contrôle sécurité est parfaite. Le but est bien sur de maitrisé le sinistre le plus rapidement possible mais la limite fût de 10 min. Objectif atteint. Des exercices comme ceux-ci servent beaucoup surtout lors de vrais sinistres à bord d'un bâtiment, comme le feu survenu en octobre 2009 lorsque que la frégate était à quai à Djibouti. Celle-ci a subi un départ de feu sur l'un de ses Diesel Alternateur suite à la rupture d'un tuyau d'huile. L'intervention incendie a duré 2h30 et a mobilisé tout le bord au poste de sécurité (Source : Journal de bord de la FLF La Fayette). Ces exercices ont d'ailleurs aidé à l'intervention des pompiers de bord lors d'une alerte réelle : Alerte, fuite d'H2S (tous les marins, et les bons en physique sont censés savoir ce que à quoi ce gaz correspond) en poupe. Intervention rapide, et la fuite a pu être rapidement contrôlé. Après ces nombreux exercices, j'ai pu me rendre au CO, le centre des opérations. Pièce très intéressante qui garde tout de même ses secrets et mystère. Mais la globalité de son rôle et de son fonctionnement m'a été expliquée. Ensuite, avant le diner, il m'est possible de me rendre dans l'armurerie du navire, là où sont stockées toutes les armes légères du bord, destinées à la défense du navire, tant en mer qu'à quai, aux interventions, ainsi qu'aux opérations extérieures. Il y avait le FAMAS, le classique, mais toujours impressionnant à voir, et surtout à porter pour la première fois, des pistolets USP, et des fusils à pompe qui tirent des balles en caoutchouc. L'armurerie possède aussi des vieilles armes datant de la seconde guerre mondiale, dont un fusil servant comme lance-amarres et une mitrailleuse qui sert encore. Après le diner, avec la mer déchainée (Mer 7, avec des rafales allant jusqu'à 72 nœuds), la fatigue engendrée, l'odeur dans les coursives (de nombreux marins ont été malades, et n'ont pas eu le temps d'aller jusqu'au dessus de la cuvette), ainsi que le commencement de mon mal de tête et de cœur, je suis parti me couché à 21h30. Exténué, le sommeil a vite été trouvé.
4 Mars. Levé 7h. Aujourd'hui est un grand jour pour le commandement et l'équipage. Aujourd'hui, en début d'après midi est prévu le GUNEX, soit l'exercice de tir. L'armement prévu est deux mitrailleuses de 12,7 mm, 4 canons de 20 mm, ainsi que la tourelle de 100 mm en proue. 13h, Briefing avec le Capitaine d'armes.
-« Messieurs, cela fait longtemps que l'on n'a pas tiré, quoique deux mois ne soit pas très long, mais je veux de la prudence et de l'attention à cet exercice. On tirera en salves sur des ballons placés à environ 200 mètres du bateau, et chaque ballon sera placé à 500 mètres d'écart. S'il y a une erreur de compréhension, n'hésitez pas à demander à répéter. On tirera donc en simultané à la 12,7 et au 20 mm, et une fois qu'on aura fini, on passera au tir de 100. »
Des bouchons anti bruit me sont donnés pour atténuer le son du tir de 20 mm. Comme l'avait dis le capitaine d'armes, ça retourne le ventre. J'étais placé deux mètres plus haut que les canons de 20 mm. Tir en salves sur les ballons placé à quelques centaines de mètres du navire.
-« Ici le commandant, coup au but ! » crachait la majorité du temps le commandant par radio.
C'est assez impressionnant de voir à l'œuvre et d'entendre les tirs d'un canon de 20 mm. On peut dire que ça change de la vie civile !
-« Tu n'as encore rien vu. Si les tirs de 20 de cassent les oreilles et te retournent le bide, alors la 100, je n'imagine pas ce que ça va te faire » me lâcha à un moment le capitaine d'armes en rigolant. C'était amusant la façon dont il me l'a dit. J'attends le tir de 100, on verra bien. En fin de compte, je me rends en passerelle pour voir le tir de la tourelle de 100 mm. Cela a donc atténué le bruit, mais ça va jusqu'à faire vibrer les vitres de la passerelle.
Seulement trois obus de 100 mm sont sortis du canon, mais c'était amplement suffisant d'après le capitaine d'armes. Fin d'exercice GUNEX, il est 16 heures. Je décide d'aller me coucher, pour me reposer et je souhaiterai assister au quart de 20h à 0h00, donc repos pour ne pas flancher en plein milieu du quart. Je dors, je dors très bien. 20h, le réveil sonne et indique le début du quart. Je me rends donc en passerelle. Ce qu'il m'a été indiqué avant que j'embarque est que l'équipage est souvent plus disponible le soir, et la nuit. J'en ai profité pour parler avec l'équipage de quart en passerelle et cela est très intéressant. Je suis passé de la barre, aux cartes, en passant par le chef de quart. Comme on peut s'en douter, l'ambiance en passerelle à cette heure ci est très calme, et surtout très sombre. Aucune lumière n'émane d'ampoule. Les lumières dégagées sont les lumières des instruments de navigation et de guidage. Il est 23h. Un exercice de 'guerre virtuelle ' est prévu avec 4 autres bâtiments. Il s'agit du Porte Avions Charles de Gaulle qui sera le bateau mère, le TCD Siroco, le BPC Mistral, la FDA Chevalier Paul, ainsi bien sur que la FLF La Fayette. Il est minuit, c'est la relève. Je n'ai pas les forces de tenir pour assister à l'exercice, qui durera jusqu'à 8h le lendemain matin. En plus, comme dis précédemment, en passerelle, avec le noir, on ne voit pas grand-chose. Fin de quart, je vais me coucher. Demain, on accoste. Retour en rade de Toulon prévu vers 10h.
5 Mars. Levé 7h. Petit Déjeuner, et ensuite, c'est l'heure de défaire les draps, les emmener à la buanderie, rendre la TBB, et ensuite il faut faire les valises. Une fois tout cela fait, je monte en passerelle pour assister à l'accostage. Comme pour l'appareillage, l'arrivé en rade de Toulon est suivi par l'arrivée des remorqueurs jusqu'à quai. On y est. La coupée est installée, c'est l'heure du départ. Il est midi. Train à 12h16, rentrée sur Paris.
Cet embarquement fût pour moi une expérience tout à fait exceptionnelle que peu de gens pourront vivre, et qui m’a permis de découvrir sommairement la Marine Nationale, mais surtout la vie à bord d’un bâtiment en mer, ainsi que le navire en lui-même (en l’occurrence la Frégate Légère Furtive La Fayette) son rôle et ses exercices. Je garderai de cet embarquement un très bon souvenir, malgré les mauvaises conditions météorologique que nous avons eu les le premier jour (Mer 7, avec des rafales de vents allant au maximum jusqu’à 72 nœuds). C'est une expérience dont je garderai un très bon souvenir. Mais après, concernant un engagement dans la Marine Nationale, je ne crois pas car je suis très axé sur l'armée de terre. Mais comme m'a dit un Lieutenant de Vaisseau lors de mon embarquement, il y a une question qui résume tout un engagement dans la Marine, et qui mérite réfléxion : "Te sens tu de vivre sur un bateau?" Que ça soit pendant des exercices de quelques jours comme là, ou même pendant plusieurs mois, comme le PH Jeanne d'arc, qui part 6 mois en mer, ou meme la FLF qui elle part deux mois en Océan Indien... A méditer pour les futurs engagés de la Royale.
Cordialement,
St Cyrien.