Dans 151 jours, je fêterai mes deux ans de présence sur ce forum, ponctués de bons moments, de belles rencontres. Ces deux ans auront été pour moi, des années de réflexion intense quant à qui je suis et ce à quoi - enfin, plutôt qui je pense être - j'aspire. Ces instants là auront été, je pense pouvoir le dire dès aujourd'hui des instants charnières de ma vie.
Ils auront révélé en moi des aspirations à servir quelque chose de bien plus grand que ma propre personne ou mes propres intérêts, des aspirations à servir une terre éternelle : la France.
Mais en cette quête, jonchée de difficultés, il m'a fallu rester réaliste quant à ce que j'étais, et donc, quant à ce que je serai demain.
Durant ces deux ans, deux questions essentielles auront été au centre de mes interrogations : qui suis-je, et quelle est ma place sur terre ?
Face à ces questionnements épineux, qui mettent naturellement à mal mon égo, j'ai su trouver des artifices me permettant de m'éviter d'affronter trop durement la stricte réalité des faits.
Je suis ici selon la volonté de Dieu, disais-je, et cela, j'y crois toujours dur comme fer aujourd'hui, mais cette réponse qui me contentait autrefois, ne m'est plus d'aucune utilité en ce qui concerne la véritable question : quel métier ?
L'attachement historique des Armées au fait religieux m'avait convaincu, un temps, d'emprunter cette voie, sinueuse certes, mais pavée de gloire. Mais dans les faits, ça n'est encore pas là qu'est cachée ma réponse...
Mais j'avais déjà un élément, qui à mon sens revêtait une importance capitale : j'étais là pour accomplir un destin, selon des commandements précis et immuables, qui relevaient tous de la plus stricte vérité.
Si j'avais alors à mon sens percé les mystères de ma venue en ce monde, je n'avais toujours pas levé le voile qui m'empêchait de contempler ma personne avec des yeux plus réalistes que les miens. En terminale, c'était désormais chose faite : je suis intellectuel, mais je déteste l'école, je ne suis pas sportif.
Alors que ces questionnements me hantaient déjà en première et en seconde, je n'avais pas pu m'y plonger plus amplement du fait des examens tous plus difficiles les uns que les autres. Grâce à Pierre Levy et à ses précieux enseignements, j'ai aujourd'hui la certitude d'avoir mon baccalauréat, ce qui, en cette fin d'année de terminale, m'a permis de me pencher très attentivement sur le cas de ma propre personne.
Penser sur soi-même, écrire sur soi, réfléchir sur sa personne, appelez cela comme vous le voudrez, mais c'est d'une utilité déconcertante. Cette introspection constante, silencieuse, dissimulée, est très efficace, et bien loin des vrais égocentriques.
Revenons-en désormais à la factualité : je n'aime pas l'école, je suis intellectuel, et je ne suis pas sportif.
Je n'aime pas l'école, c'est une évidence et je ne l'ai jamais caché, mais cela m'empêchera par la force des choses d'aller à l'université. Je n'en ai pas la volonté, de toute manière.
Je suis intellectuel, j'ai ce besoin irréversible de m'emplir de connaissance, cela est certainement le fait de l'autisme. Il m'est donc impossible de construire un mur entre ma personne et la destinée de la France, à laquelle je suis, je le pense, lié, comme tous les Français. Non pas biologiquement, non pas historiquement, pas seulement par les sentiments ou la raison, c'est bien plus fort que tout cela. Mieux qu'une race, la France est une nation, disait Jacques Bainville.
Je ne suis pas sportif, la pratique du sport me révulse, même si j'entends bien obtenir et entretenir une bonne condition physique tout au long de ma vie.
Je pense que par l'étude de mon texte pour vous, et par l'étude du réel pour moi, nous avons tous pu conclure à une chose : l'armée, la gendarmerie, ou même la police n'étaient pas faites pour moi. Et cette conclusion, loin d'être tombée dans la désuétude, est aujourd'hui plus vraie encore.
Tout m'y prédestinait pourtant, ici même, en ce lieu, on me prédisait une brillante carrière d'officier de gendarmerie. Même dans mes plus doux rêves je ne pouvais me mettre dans la tête que cela pouvait être une réalité future. J'étais déjà lucide quant à mon état à la seconde même où je me suis inscrit sur ce forum, et pourtant, j'ai persisté dans l'ignorance de ma propre condition.
Alors, j'aimerais désormais conclure par deux points : pourquoi donc suis-je en train d'écrire tout cela ? Quel est désormais mon futur ?
J'ai toujours eu la crainte d'un jour voir ressurgir mes tares intérieures, notamment le jour de la visite médicale. Que l'on m'annonce froidement que toutes mes espérances allaient être étouffées par ces choses-là : autisme, acuité visuelle...
Alors quelles voies s'ouvraient à moi ? Il n'y a en France, pensais-je, d'autres corps si utiles à la Nation ! D'autres corps qui, jour et nuit, s'attachent à la défendre ! Ce sont eux, les jeunes gens des équipes qui relèveront la France, comme le disait un célèbre officier français.
Mais je tiens alors à rassurer ceux qui, comme moi, avaient ou ont encore cette profonde crainte de ne plus œuvrer ne serait-ce qu'une seconde pour leur Nation : il existe, et je l'ignorais, d'autres corps utiles, dévoués à leur mère. La même qui, de la maternité à l'épitaphe, les berçait. Celle dont on disait que l'on naissait par elle, puis que l'on mourrait pour elle, dans le même élan de vigueur et d'amour.
Mon futur, désormais, il se trouve en l'artisanat. Mes tares profondes resteront éternellement des tares, je ne suis pas habile de mes mains, du fait de la dyspraxie. Certes, c'est problématique quand il s'agit de devenir plombier, car c'est bien à cela que j'aspire désormais. Je vais faire tout mon possible pour rejoindre les Compagnons du Devoir.
Je ne vais pas longuement parler de cette institution, elle est connue, mais ses qualités sont nombreuses, et elle contribue à la formation de nombreux artisans, artisans qui participent à tous les efforts nécessaires au pays, énumérés plus haut.
L'artisan est un bâtisseur, c'est l'homme du dur labeur, l'homme à la base de toute chose.
Sur cette déclaration, qui j'ose l'espérer aura aidé certaines personnes, je vous souhaite à tous une agréable vie, une bonne soirée, et de trouver un jour la Vérité avec un grand V, celle qui vous guidera tout au long de votre chemin sur notre terre. N'oubliez jamais que vous êtes ce que vous êtes, que vous ne pouvez rien y changer, mais que vous pourrez toujours aspirer à mieux, au service de la France. Quant à ceux déjà engagés sous les drapeaux, que ça soit dans l'armée, dans le bâtiment-travaux-publics, ou dans la grande distribution, sachez que vous avez mon plus profond respect.
Tout le monde ne verra pas son sang abreuver les terres de France, sa sueur remplir ses lacs et ses rivières, mais nous aurons tous, je pense, au crépuscule de notre vie, cette vive espérance qui nous ordonnera cette phrase : j'espère avoir su me rendre utile à mon pays et aux miens.
Vous aurez été, tous autant que vous êtes, des pseudonymes les plus mémorables tels que ceux de BTX ou de Pierre Lévy, à ceux dont j'ai oublié le nom, d'une grande aide, et vous aurez toujours mon éternelle reconnaissance.
Que la paix soit sur vous.