Présenté en juin 2020, dans un contexte marqué par la pandémie de covid-19, le plan gouvernemental de soutien à la filière aéronautique avait prévu d’acquérir 10 hélicoptères H160 pour les Forces aériennes de la Gendarmerie nationale [FAGN]. Mais la commande ne fut notifiée à Airbus Helicopters que dix-mois plus tard, en même temps que celle portant sur les 169 H160M « Guépard » destinés au ministère des Armées.
D’une masse de 6 tonnes, le H160 peut transporter quatorze personnes [en comptant les deux pilotes] sur une distance de 880 km, en volant à 6 000 mètres d’altitude et à une vitesse de croisière de 285 km/h [et à 315 km/h à la vitesse maximale, ndlr]. Pour les FAGN, cet appareil est censé ouvrir de nouvelles perspectives par rapport à leurs Écureuil et autres H135 et H145. Ainsi, il leur permettra de mener des vols d’observation, d’appui et de projection longue distance, notamment lors d’opérations de lutte contre le grand banditisme et de contre-terrorisme.
Normalement, les premiers H160 auraient dû être livrés leur être pour leur permettre d’assurer la sécurité des Jeux olympiques de Paris 2024. Sauf que ce ne fut pas le cas, le programme ayant pris du retard pour des raisons qui restent encore à être précisées aujourd’hui.
À moins que ces dernières ne soient sous-entendues dans le communiqué qu’Airbus Helicopters a publié pour annoncer la livraison d’un premier H160 aux FAGN, celle-ci ayant fait l’objet d’une cérémonie organisée à Marignane, le 16 décembre.
« La livraison du premier H160 à la Gendarmerie nationale est le fruit d’une étroite collaboration avec la Gendarmerie et la Direction générale de l’armement, afin de développer une solution entièrement dédiée aux missions de sécurité les plus exigeantes », a en effet commenté Bruno Even, le PDG d’Airbus Helicopters.
« Ce programme témoigne de notre engagement pour l’avenir de la défense et de la sécurité françaises, notamment à travers le développement en cours du H160M Guépard, dont le premier vol a eu lieu l’été dernier. Les synergies établies entre ces deux programmes profitent directement aux forces françaises, garantissant un niveau de performance et d’interopérabilité sans précédent pour les missions civiles et militaires critiques », a-t-il ajouté.
Cette livraison fait suite à celle de deux nouveaux H145, sur les six commandés en 2023, via un contrat signé conjointement avec la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises [DGSCGC]. Deux de ces hélicopères seront utilisés par les FAGN pour des missions de lutte contre l’immigration illégale et clandestine sur le littoral du Pas-de-Calais [mission Sandhurst].
Selon Airbus Helicopters, le H160 et le H145 sont complémentaires dans la mesure où ils ont en commun de « nombreuses caractéristiques », dont la suite avionique Helionix, les systèmes de communication et les équipements de mission. Et cela ne pourra que faciliter leur maintenance, l’interopérabilité et la formation de leurs équipages.
De son côté, la Gendarmerie nationale a précisé que ce H160 va d’abord être confié à la DGA pendant cinq mois, pour des essais en vol à Istres. Il s’agira de « qualifier les équipements de missions propres à la gendarmerie, comme la caméra embarquée, l’aérocordage et le vol sous jumelles de vision nocturne », a-t-elle ajouté. L’enjeu est aussi de permettre aux FAGN « d’apprivoiser » ce nouvel appareil, « au gabarit et aux caractéristiques jusqu’alors inconnus en gendarmerie », a-t-elle souligné.
Cela étant, l’arrivée des H160 et de six nouveaux H145 masque une réalité plus sombre pour les FAGN. D’ailleurs, le général Hubert Bonneau, le directeur de la Gendarmerie nationale [DGGN] s’en était inquiété lors de ses récentes auditions parlementaires.
Au 1er janvier 2025, la Gendarmerie comptait théoriquement 56 hélicoptères, dont 15 EC145, 15 EC135 et 26 AS350 « Écureuil ».
« Mais le grand âge des Écureuil, qui atteint 40 ans, signifie que l’ensemble de la flotte doit être réformée entre 2028 et 2030. Les EC145 sont eux aussi relativement proches de la réforme, prévue aux alentours de 2035. De plus, 8 appareils ont d’ores et déjà été retirés du service en raison du coût trop élevé de leur remise à niveau [et d’une corrosion trop importante, ndlr] », a relevé un rapport du Sénat publié le mois dernier.
Aussi, au 31 juillet 2025, seulement 34 hélicoptères étaient opérationnels car 14 étaient immobilisés pour une longue période de maintenance. En outre, le taux de disponibilité de ces appareils est en forte baisse, celui des AS350 « Écureuil » étant passé de 71 % en 2017 à 54 % en 2024. Et, dans le même temps, le coût de maintien en condition opérationnelle [MCO] explose : stable entre 2012 et 2022, autour de 20 millions d’euros, il sera de 63,5 millions en 2026.
« Plusieurs fermetures temporaires de sections aériennes de gendarmerie ont déjà eu lieu, en raison de l’absence d’appareils de remplacement le temps d’effectuer les réparations nécessaires sur les Écureuil », a constaté le rapport du Sénat, pour qui il est donc « impératif d’affermir avant début 2027 par un ordre de service la tranche supplémentaire de 22 H145 prévue dans le cadre du contrat signé avec Airbus Helicopters ». Seulement, au regard de l’importance des sommes nécessaires [355 millions d’euros], « cela représente un défi budgétaire majeur », a-t-il conclu.
Photo : Gendarmerie nationale
https://www.opex360.com/2025/12/20/la-gendarmerie-nationale-a-enfin-recu-son-premier-helicoptere-h160/