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Ce que contient le dernier rapport sur les exportations d’armement sur le soutien français à l’Ukraine
Quelques Mirage et des missiles Aster supplémentaires seront prochainement livrés à l’Ukraine, rare annonce de l’Elysée concernant un appui matériel peu évoqué depuis le printemps 2024. À moins de se plonger dans un rapport au Parlement sur les exportations d’armement dont la dernière édition est désormais en ligne.
C’est peu dire si la France n’est pas prolixe en matière d’équipements militaires cédés ou financés au profit des forces ukrainiennes, à contre-courant de quelques (très) grands soutiens européens comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou le Danemark. Côté français, le dernier relevé date de mai 2024. Depuis, silence quasi complet. Seul l’exercice annuel du rapport sur les exportations d’armement permet de compléter un peu les quelques sorties officielles.
Au 1er mai 2024, la France avait livré pour une valeur totale de 3,035 Md€ d’équipements militaires. Un chiffre parfois remis en doute, la valeur d’un VAB cédé pouvant difficilement être comparée à celle du Griffon flambant neuf acquis pour le remplacer. Huit mois plus tard, l’étendue de ce soutien pouvait cette fois être estimée à 5,9 Md€, explique l’édition 2025 du rapport. S’y ajoutent les 2,3 Md€ de la contribution française à la Facilité européenne pour la paix (FEP), dont 1,4 Md€ reste suspendu à l’accord de la Hongrie pour la mise en place des remboursements.
« La valorisation des matériels cédés à l’Ukraine s’élève à plus de 3 Md€ depuis le début du conflit », déclarait pour sa part la nouvelle ministre des Armées et des Anciens combattants, Catherine Vautrin, mardi dernier aux députés de la Commission de la défense nationale et des forces armées. Les montants diffèrent considérablement, mais une chose est certaine : il y aura bien eu un « effet Ukraine » avec 533 licences d’exportation octroyées en 2024. Toutes ne sont pas liées à une vente ou à une cession, mais le niveau atteint reste quatre fois plus élevé qu’en 2023.
Après l’urgence des premiers mois puis le soutien des matériels livrés et leur recomplètement, « l’enjeu de 2024 a été la poursuite actuelle de l’aide dans la durée, dans des domaines capacitaires clés comme l’artillerie, la frappe dans la profondeur ou la défense sol-air », précise le rapport au Parlement. En témoignent ces six canons de 155 mm, quatre systèmes d’artillerie recouvrant sans doute l’ensemble ou une partie des LRU prélevés sur le parc du 1er régiment d’artillerie et 10 mortiers tractés de 120 mm. S’y ajoutent 162 « véhicules blindés de combat » et 18 « chars de bataille » supplémentaires, deux termes génériques recouvrant certainement de nouveaux lots de VAB et d’engins AMX-10 RC.
La liste se poursuit avec 22 « missiles et lanceurs de missiles » de défense anti-aérienne, 4000 pistolets semi-automatiques, 300 « fusils », 282 mitrailleuses de 7,62 mm, 156 mitrailleuses de 12,7 mm, 282 systèmes de missiles ou de roquettes antichars. La France a également importé 60 pistolets automatiques d’Autriche et 12 « carabines » de Finlande avant de les rediriger vers l’Ukraine.
Quelques matériels relèvent d’exportations « classiques », comme ces 10 « véhicules blindés de combat » non détaillés et ces 30 pièces d’artillerie de 155 mm cachant certainement des CAESAR 6×6 neufs. Pas un mot sur les livraisons d’obus d’artillerie, même si la catégorie à laquelle ils appartiennent (ML3) fait état de neufs licences octroyées pour un montant de plus de 1,4 Md€.
Reste que, si la France s’implique un peu partout, ses stocks de matériels militaires ne sont pas infinis. « Nous sommes plutôt au bout de la logique des cessions. Il faut donc aller vers une logique de partenariats industriels, chercher de nouveaux modes de financement. Nous avons engagé du crédit politique pour obtenir des financements pour l’Ukraine notamment dans le cadre du G7 pour prendre le relais de budgets », rappelait la ministre des Armées.
L’évolution du soutien touche également au fonds bilatéral de soutien mis en place pour permettre à l’Ukraine d’acquérir des équipements neufs auprès de la filière industriel française. Concrétisé au travers d’un accord intergouvernemental (AIG), ce fonds avait été abondé à hauteur de 200 M€ en 2024. Il ne sera pas renouvelé ni en 2025, ni en 2026, un désengagement que le gouvernement n’explique pas malgré un budget de défense qui doit, sauf écueil majeur, bondir de 6,7 Md€ l’an prochain.
L’aide française ne s’arrête par ailleurs pas au seul levier matériel. Quelque 19 000 militaires ukrainiens ont été formés à ce jour par la France sur son sol ou en Pologne dans le cadre de la mission d’assistance militaire de l’Union Européenne (EUMAM), là où des modules de moniteurs de tir, de combat en zone urbaine et de reconnaissance démarraient mi-octobre. « La France n’a pas à rougir, non seulement financièrement mais en plus en terme de cessions puis surtout en terme d’idées et de courage politique sur le soutien à l’Ukraine », résumait Alice Rufo, ministre déléguée auprès de la ministre des Armées et des Anciens combattants, en audition parlementaire.
Crédits image : 55e brigade d’artillerie des FAU