La prolongation des Lance-roquettes unitaires au-delà de 2027 pose un défi aux maintenanciers de l’armée de Terre

[BTX]

Alors que la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 était en cours d’élaboration, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, avait insisté sur la nécessité de renouveler les capacités en matière de feux à longue portée en remplaçant les Lance-roquettes unitaires [LRU] du 1er Régiment d’Artillerie [RA] avant 2027.

« La guerre en Ukraine nous enseigne que les feux très longue portée sont décisifs : il nous faut réfléchir sur la solution à retenir », avait en effet déclaré le CEMAT, lors d’une audition au Sénat, en novembre 2022.

Pour rappel, dans les années 1990, l’armée de Terre avait mis en service cinquante-sept lance-roquettes multiples [LRM] M270, d’une portée comprise entre 30 et 45 km selon les munitions utilisées. Puis, la France ayant signé la convention d’Oslo sur l’usage des armes à sous-munitions, il fut décidé de convertir treize de ces systèmes en « lance-roquette unitaires » [LRU], censés être plus précis grâce à la roquette M31A1, celle-ci pouvant atteindre une cible située à 70 km de distance.

Seulement, le 1er RA a dû se séparer de trois de ses LRU, au titre de l’aide militaire à l’Ukraine.

Cependant, le général Schill a été entendu car la LPM 2024-30 prévoit le remplacement des LRU par une solution, si possible, souveraine. D’où le lancement du programme FLP-T [Frappe longue portée terrestre] par la Direction générale de l’armement [DGA], laquelle a mis en place un « partenariat d’innovation » impliquant deux consortiums, l’un formé par MBDA et Safran, l’autre par Thales et ArianeGroup.

Sauf que le FLP-T ne devrait pas se concrétiser avant 2027. Fataliste, le général Schill a récemment admis que la « division bonne de guerre » que l’armée de Terre devra être en mesure d’aligner à cette échéance ne disposera pas de nouvelles capacités en matière de feux dans la profondeur.

Cette unité « bénéficiera d’une combinaison entre le mortier de 120 mm, le canon Caesar, nos LRU maintenus autant que possible en service et des munitions téléopérées, pour neutraliser l’adversaire avant le contact », a en effet expliqué le CEMAT aux sénateurs. Et d’ajouter : « J’ai donc besoin, d’ici 2027, d’une capacité à tirer en profondeur dans la frange des 100 kilomètres. Il est donc nécessaire de prolonger les LRU, puisqu’ils ne seront pas remplacés à court terme ».

Or, le maintien en condition opérationnelle [MCO] des LRU restants s’annonce difficile étant donné que ce type de matériel n’est plus soutenu par l’industriel américain qui l’a conçu. C’est en effet ce qu’a rappelé la Structure Intégrée du Maintien en condition opérationnelle des Matériels Terrestres [SIMMT], via le réseau social LinkedIn, la semaine passée.

Aussi, l’entretien de ce systèmes d’artillerie repose uniquement sur les maintenanciers de l’armée de Terre. Maintenanciers qui, difficulté supplémentaire, ne disposent pas de toute la documentation nécessaire pour effectuer une telle tâche. Et le tout en composant avec la rareté de certaines pièces.

La SIMMT a donné un exemple de cette difficulté en évoquant le travail du détachement de Tulle de la 13e Base de soutien du matériel [BSMAT], dont l’expertise en hydraulique et en mécanique est reconnue. Celui-ci a donc dû trouver une solution pour réparer un élément critique du LRU, à savoir la boîte de vitesses HMPT-500E, associée à son groupe motopropulseur de 500 chevaux.

Quoi qu’il en soit, le détachement corrézien de la 13e BSMAT ont su relever le défi. « Malgré la complexité de l’assemblage et la rareté de la documentation en français, une première boîte a été réparée avec succès, y compris la refabrication de pièces introuvables comme une bague de guidage en polymère », a expliqué la SIMMT.

Un tel travail a exigé plus de 100 heures de recherches, 120 heures d’atelier et deux jours d’essais.

« Actuellement, le détachement de Tulle continue ses réparations sur un nouveau lot de boîtes, sous la validation de la DGA, pour établir une solution de maintenance étatique », a conclu la SIMMT.

https://www.opex360.com/2025/02/02/la-prolongation-des-lance-roquettes-unitaires-au-dela-de-2027-pose-un-defi-aux-maintenanciers-de-larmee-de-terre/