Lettre posthume à mon fils

[ArtNoise]

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Chroniques | 24 février 2013

Lettre posthume à mon fils

Cette semaine, un légionnaire français a été tué au Mali. L’occasion pour Philippe Baillé, officier rentré d’Afghanistan récemment et actuellement stagiaire à l’École de guerre, de revenir sur la notion de « la mort pour rien ». En 2012, avant de s’envoler pour Kaboul, ce commandant avait écrit une lettre à remettre à son fils en cas de mort au front.

Mon fils, je suis mort d’abord parce que j’ai choisi de m’engager en acceptant que cela puisse arriver. M’engager pour mon pays, pour des valeurs, m’engager tout entier, de tout mon coeur. Je suis mort car c’est l’accomplissement ultime de la mission, je suis mort car cela fait partie du job. La vie pour un militaire est comme un manteau. On la laisse au vestiaire à l’entrée du spectacle en espérant pouvoir la reprendre en partant… Quelquefois, le spectacle ne se termine pas comme on l’aurait souhaité et le manteau reste au vestiaire… La mort fait partie du paquetage du militaire. C’est pour cela que l’on a une place spéciale dans notre société. Nos dirigeants le savent bien. On le fait librement et volontairement, sans jamais rien dire. Tu dois savoir aussi que ceux qui décident sont toujours critiqués et qu’il est facile de leur faire des reproches. Je sais que nos morts changent nos chefs et que celui qui nous côtoie en est à jamais changé car la mort et la guerre ramènent à l’essentiel.

Alors suis-je mort pour rien? Pour moi, ce "rien"-là est déjà honorable. Aujourd’hui, les gens sont en quête de tout, ils veulent la gloire, la richesse, la célébrité… Ils veulent le bonheur à tout prix. Moi je ne veux pas de cette "gloire"-là. Je ne veux pas être présenté comme une victime au journal télévisé entre deux approximations. Si tel devait être le cas, je préfère mourir dans l’ombre, dans l’intimité de mon engagement. Aujourd’hui un autre soldat me remplace déjà, je lui ai d’ailleurs transmis le flambeau de ceux qui sont prêts à mourir pour "notre rien".

Je te demande de ne pas en vouloir à celui qui m’a tué, à condition qu’il l’ait fait avec honneur. Si c’est au combat, c’est un soldat qui mérite qu’on le respecte. Si c’est un terroriste prêt à toutes les bassesses pour frapper aveuglément, c’est un lâche qui ne mérite même pas ton mépris. Lui aussi a sans doute un fils et il sait ce qu’il en coûte de priver un fils de son père. Je ne peux pas croire qu’il l’ait fait à la légère. Il ne l’a pas fait pour rien. C’est pour cela qu’il faut être bien sûr du sens que l’on donne à sa vie avant de s’engager dans l’armée. C’est le seul moyen d’éviter que notre rien ne soit vide de sens.

Dernière chose : ta maman, triste mais fière, accepte déjà cet ultime départ loin de vous. Pourquoi? Parce qu’elle le savait, elle l’avait déjà accepté avant même que la mort ne vienne me prendre. Elle m’en avait fait la promesse le jour où on s’est juré d’unir nos destins. Elle te racontera et t’aidera à admettre l’incompréhensible : s’engager pour quelque chose de grand, quelque chose qui nous dépasse.

Philippe Baillé - Le Journal du Dimanche

dimanche 24 février 2013

[lounissart]

Très belle lettre...

[Dorian14]

C'est une lettre magnifique qui me donne des frissons...

[marsouin-para]

Magnifique

[Cracka]

Respect pour ce soldat !

[RADU]

Je ne comprend pas pourquoi une lettre privée destinée à son fils en cas de décès doit paraître dans la presse lorsque l'auteur n'est pas mort (heureusement). Je ne connais pas cet officier,mais la démarche est un peu pathétique à mon gout. Bien que ce qui est dit dans cette "lettre" est beau et vrai,la forme de la transmission de ces pensées laisse à désirer. Opinion personnelle.

[Tricks974h]

A mon humble avis, les familles, et surtout enfants de militaires morts en services trouveront peut être des réponses dans cette lettre.

En effet, beaucoup de militaires doivent penser de cette façon.

Belle initiative, belle lettre.

[hatonjan]

moi aussi, je n'osais le dire, mais bon... ça me gène un peu. Après, ça fait une belle prose qui peut faire méditer certains, et c'est toujours ça ! (d'ailleurs en soit, c'était peut être fait pour.)

[ArtNoise]

J'ai pensé comme vous avant de poster,

Mais vu qu'il "quitte son poste de commandement de terrain" pour recevoir une formation d'officier supérieur, le risque devient amoindris.

Après une recherche de l'enseignement qu'ils recevoivent et pour quel types de missions. http://www.ecoledeguerre.defense.gouv.fr/spip.php?rubrique4

J'en conclus qu'il a voulu montrer, la vraie face d'un officier de terrain, et le recul auprès de sa famille,

[lounissart]

J'ai tendance à penser comme Radu.

A y réfléchir, également...

[RADU]

Je me suis permis de relire cette "lettre" et j'avoue avoir du mal (aussi) à comprendre dans quel Afghanistan le commandant a servi. Là-bas il n'y avait que deux sortes d'adversaires : les insurgés et les types de l'ANA qui étaient soit des insurgés infiltrés soit des types qui pétaient un plomb. Les deux,les insurgés comme les ANA,lorsqu'ils nous tiraient dessus (et ils l'ont fait,et il sont tué des nôtres !) n’étaient pas "des soldats" . Alors j'ai vraiment beaucoup de mal à cerner le soldat ennemi dont parle le commandant.

Je te demande de ne pas en vouloir à celui qui m’a tué, à condition qu’il l’ait fait avec honneur. Si c’est au combat, c’est un soldat qui mérite qu’on le respecte. Si c’est un terroriste prêt à toutes les bassesses pour frapper aveuglément, c’est un lâche qui ne mérite même pas ton mépris. Lui aussi a sans doute un fils et il sait ce qu’il en coûte de priver un fils de son père. Je ne peux pas croire qu’il l’ait fait à la légère. Il ne l’a pas fait pour rien.

[marsouin-para]

Je crois qu'il parle plus comme un "idéaliste". Comme à l'époque de la décolonisation, lorsque Bigeard rendait moultes hommages aux chefs de guerre adverses comme Si Azzedine (pas au terrorristes hein), aux vrais chefs de la rebellion. Mais hélas, il n'existe plus d'ennemis comme cela. Fini les guerres contre des hommes en uniforme, désormais c'est le terrorrisme qui trône, adeptes des coups dans le dos et des attaques indirectes, ainsi que de la dissimulation au sein de leur peuple, auquel ils s'en servent comme de boucliers humains

[RADU]

..et n'est pas Bigeard qui veut !

[Jovan93]

Bonsoir,

Sans vouloir lancer un débat sur la situation de l'Afghanistan, je pense que résumer les adversaires auxquels les soldats ont eu à combattre aux terroristes est une erreur.

En effet, les talibans ou les soldats d'Al-quaida (deux choses différentes, il ne faut pas confondre l'hôte et le parasite) ne représente pas tout les soldats qui ont combattu contre nous. La richesse

des peuples qui occupent l'Afghanistan ne peut pas être occulté.

Par conséquent, je pense (et ce n'est que mon humble avis de civil) que la lettre du commandant est juste et peut permettre de comprendre l'engagement du militaire.

[RADU]

Bonsoir,

Sans vouloir lancer un débat sur la situation de l'Afghanistan, je pense que résumer les adversaires auxquels les soldats ont eu à combattre aux terroristes est une erreur.

.

Toujours sans chercher la polémique : puis-je savoir ,même à posteriori,qui exactement était le soldat qui me tirait dessus ? Celui qui en me capturant aurait pensé 1 seconde à Genève,par exemple ? Je demande,car entre ceux qui nous disaient bonjour le matin et nous tiraient le soir et les ANA que j'avais plutôt intérêt à garder devant moi plutôt que sur les flancs j'ai dû mal à trouver le soldat d'en face dont parle cette lettre.

Mais il se peut aussi que je n'ai pas lu suffisamment sur la richesse des peuples d'A-stan...

[marsouin-para]

Pour MARSOUINPARA,

Dans ce cas précis, s'agissant du Gal Bigeard, l'exemple est inapproprié. Il eût plutôt fallu citer le Gal Giap.

BTX

Il a eu du respect pour Giap, certes mais à toujours eu en travers de la gorge, même de la rancoeur jusqu'à la fin de sa vie pour cet homme, adepte du marxisme, qui a laissé mourir les francais en captivité, alors "qu'une banane par jour suffisait pour ramener tout le monde à la maison" (CF : Bigeard).

Pour Azzedine, je fais référence notamment à la poignée de main sur un plateau TV, auquel il répondra aux polémiques par : "On ne se déshonore pas en rendant hommage à l'adversaire".

Il a aussi rendu hommage, entre autre, à Lardi Ben M'Hidi. Et je crois que c'est de lui qu'il parlait quand il avait dit "Avec 4 gars comme ça, je peux aller conquérir le monde entier", quelque chose comme ça.

[Lee]

Vu que la lettre était destinée à son fils en cas de déces, c'est normal qu'elle soit quelque peu édulcorée à mon sens...

[RADU]

Donc de la prose. Destinée peut-être à son fils en cas de décès mais certainement à la presse en cas de survie. Question de gout,mais j'aime pas.

Over&Out pour moi.

[Squal]

Pas grand chose a rajouté a cette magnifique lettre

[FUSCO]

pareil je suis partagé aussi .

je la trouve belle, mais une lettre posthume c'est qlqch de privé, d'intime.