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Charles Malinas, ancien ambassadeur de France en RCA, sur la présence russe : « Faustin-Archange Touadéra fait flèche de tout bois... »


BTX

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https://ainsi-va-le-monde.blogspot.com/2025/02/charles-malinas-ancien-ambassadeur-de.html

Le diplomate Charles Malinas a été ambassadeur en République centrafricaine entre 2013 et 2016. Une mission sur laquelle il est revenu dans un livre publié en 2022, Un intermède centrafricain, la France en Centrafrique, publié chez L’Harmattan. Occasion d’examiner avec lui la situation de la RCA sous influence russe.

 
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L'Afrique est aujourd'hui devenue une ligne de front entre l'Occident et la Russie ?
Pour ma part, je parlerais d’abord d’un retour de la Russie en Afrique dont elle avait été chassée après la chute de l’URSS.

Moscou a exploité certaines situations pour revenir, via la Libye et le Soudan, en s’appuyant sur la Centrafrique, et développer son influence et sa présence en RCA, au Mali, au Burkina Faso et au Niger, avec sans doute d’autres objectifs notamment la Guinée qui est un point de passage du matériel militaire, comme on l’a vu début janvier.

Pour l’instant, c’est une avancée en Afrique francophone. Ailleurs, c’est-à-dire dans la plus grande partie du continent, on n’observe pas de mouvements notables à ce stade, même si la présence économique d’éléments de Wagner est attestée dans plusieurs pays.


De leur côté, les pays dits occidentaux sont plutôt dans l’observation, en particulier ceux qui sont historiquement présents dans la sous-région, la France et les États-Unis.
Donc je ne crois pas qu’on ait à ce stade une ligne de front au sens propre, mais un espace de possible confrontation à surveiller – sachant que l’Afrique fait face à de nombreux conflits, ouverts ou en gestation : au Sahel, dans l’est de la RDC, au Soudan, dans la Corne… et que plusieurs pays connaissent des situations de redistribution du pouvoir, démocratique ou non.

La RCA, pays historiquement instable, en est un exemple ?
La RCA est la tête de pont de ce mouvement. Elle l’a été dans un premier temps de manière relativement masquée avec Wagner qui a proposé des « conseillers » militaires en même temps que Moscou recevait différents responsables centrafricains, fournissait des armes pour les Forces armées centrafricaines (FACA) et plaçait un membre de son ambassade, Valery Zakharov, directement auprès du président Faustin-Archange Touadéra (FAT). Les « conseillers » se sont rapidement révélés être des mercenaires dont le nombre s’est élevé jusqu’à 2000. Par comparaison, la force Sangaris, déployée par Paris entre 2013 et 2016 sur mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, a oscillé entre 1500 et 2000 hommes, selon les périodes. Dans un second temps, après la tentative du patron de Wagner, Evgueni Prigojine, de marcher sur Moscou en juin 2023, le Kremlin a abandonné le faux-nez Wagner et la présence militaire russe est devenue officielle sous l’appellation d’« Africa Corps ».

Le pays est devenu un laboratoire de la propagande de Moscou ?
En quelque sorte. Est-ce que ce modèle est reproductible ailleurs, je ne sais pas. Ce qui est certain, c’est que le Kremlin tire profit de la faiblesse de l’État centrafricain et du délabrement politique, administratif et économique du pays pour développer sa présence et son influence, jusqu’à tirer un large profit des ressources notamment minières du pays -au premier chef diamant et or- pour financer son opération, et au-delà.

Où le label Wagner, contrairement à d'autres pays du continent, n'a pas disparu voire prospère ?
La présence toujours affichée de Wagner, y compris avec une stèle à la gloire de feu Prigojine à Bangui, peut surprendre. Elle traduit sans doute le fait que des miliciens Wagner continuent d’être présents et d’agir – y compris pour leur propre compte – en RCA, mais aussi le poids de l’image laissée par Prigojine à Bangui, et l’existence de miliciens centrafricains recrutés par Wagner toujours actifs. Ils sont appelés les « Russes noirs ». Ceci parallèlement à la présence officielle russe. Mais la question du label me paraît relativement secondaire. Ce qui est important, c’est la présence, l’influence et le profit qu’en tire Moscou ; profit politique sur le plan international -africain et mondial-, et économique.

Wagner, c'est un symbole de la prédation économique russe ?
C’est en tout cas un exemple de cette prédation même si, à mon sens, la dimension économique de la présence russe est moins importante, pour Moscou, que sa dimension politique. Wagner a été un instrument au service du Kremlin, au moins jusqu’à sa rébellion manquée en 2023.

Et de massacres ?
Wagner s’est rendu – et continue manifestement de se rendre - coupable de très nombreuses exactions et de véritables massacres. Plusieurs de ces actes sont documentés et il faut espérer que les auteurs comme les donneurs d’ordre seront un jour poursuivis et punis.

Le groupe n'hésite pas à recruter des mercenaires dans tous les milieux y compris dans les prisons centrafricaines, notamment pour se battre en Ukraine ?
Il apparaît que la Russie recrute effectivement en Afrique, pas seulement en RCA, des mercenaires à qui l’on promet monts et merveilles, et qui sont ensuite envoyés sur le front ukrainien.

Cette lune de miel supposée entre Touadéra et Poutine durera-t-elle ?
Faustin-Archange Touadéra fait flèche de tout bois. Les palinodies de la France en 2016-17 ont ouvert la voie à la Russie, ainsi que je l’explique dans mon livre. FAT a utilisé cette « main tendue » russe car il avait besoin de soutien face aux rebelles toujours très actifs ; besoin de soutien à mettre en regard de la coupable impuissance de la force des Nations Unies en RCA, la MINUSCA, plus de 15000 personnels à l’époque, dont plus de 13000 militaires. Il ne s’agit ainsi pas tant d’une lune de miel que d’une union forcée par la nécessité dans laquelle il se trouvait et dans laquelle nous, la France, l’avions placé. Depuis, il navigue entre les différents appuis qui s’offrent à lui : la Russie et le Rwanda qui a pris la direction de la MINUSCA et assure sa garde rapprochée, mais aussi la France qui est revenue dans le jeu -reprise des contacts au plus haut niveau, rétablissement d’une partie de l’aide budgétaire- et le FMI dont les demandes, pourtant mesurées, peinent à être satisfaites…

Photo : DR

Ya Rab Yeshua.

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