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Coëtquidan par ceux qui en sortent et par celui qui étudie ceux qui s'y forment


BTX

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http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2023/10/13/coetquidan-par-ceux-qui-en-sortent-et-par-celui-qui-les-etud-24170.html

Les livres qui traitent de l'Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan ne sont pas nombreux. Récemment, j'ai signalé celui d'une ancienne élève de l'ESM qui a quitté l'Institution après une année de formation (voir ici).

Le hasard des publications fait que deux autres ouvrages portant sur cette triple école m'ont été récemment adressés. Mais un peu de retard à réduire les piles de livres que je disperse entre Ouest-France et chez moi a retardé la lecture de ces deux ouvrages. Coïncidence, les deux livres sont publiés par l'éditeur normand Pierre de Taillac.

Le premier est l'oeuvre d'un ethnologue que les élèves de Saint-Cyr connaissent tous (serait-il aussi connu que le mythique capitaine Bulle?). C'est celui d'un ethnologue, Claude Weber, qui a déjà passé "trois décennies, 30 années, 11 000 jours"...  à Coët. "Il s'agit de la plus longue immersion dans le monde militaire jamais menée", selon l'éditeur. On ne chipotera pas sur le record. 

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C'est par hasard que Claude Weber, étudiant en ethnologie qui travaillait alors sur l'utilisation de la mobylette à Ouagadougou s'est retrouvé à étudier l'Institution militaire française. "Tout a commencé le mercredi 6 octobre 1993 à 10h15. Ce jour-là, muni de ma convocation, je me présentais aux portes du 1er régiment du génie d'Illkirch-Graffenstaden, près de Strasbourg". A 24ans, Claude Weber poussait la porte des "ethnies kakis" en devenant appelé du contingent. Il  ne savait pas que ce service national, bien que raccourci, allait changer sa vie. 

Son livre s'ouvre sur une introduction dont l'Institution ne peut négliger les messages. C'est un plaidoyer pour une ethnologie du fait militaire, discipline en quête de reconnaissance (le premier colloque sur l'ethnologie militaire en France date de 2022!). Le livre se poursuit par une rétrospective de "30 ans d'études de terrain" puisque Claude Weber a réalisé sa première étude du milieu militaire en 1993.

En une courte page, l'auteur résume sa trajectoire: son service national en 1993, ses années de scientifique outsider (1994-1995), ses années de chercheur extérieur (1995-2002) et enfin celle "d'insider à temps" plein comme enseignant chercheur détaché à Guer. Puis il les détaille systématiquement, en 107 pages, décrivant sa position "d'indigène" au sein de cette fameuse ethnie kaki et les réactions que sa présence et ses travaux "embedded" provoquent (réactions qui rappellent celles suscitées par la présence prolongée de journalistes embedded).

Le livre se clôt sur les éléments de réponse à une question fondamentale: "faut-il aimer son terrain?" au risque de perdre de la distance et de ne plus produire d'analyses critiques et détachées. Claude Weber répond "sans la moindre retenue par l'affirmative". Et il prouve irrémédiablement qu'il aime ce terrain humain de Saint-Cyr en ne tenant pas rigueur aux élèves qui en 2008 lui ont attribué le fameux prix Baraguey, décerné au cadre le plus détesté et qui a suscité le plus le mécontentement des élèves.

(ajout de BTX = la sévérité légendaire du Maréchal Achille, Comte Baraguey d'Hilliers, (1795-1878) lors de son passage comme commandant de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, a valu la création d'un prix par les élèves, le Baraguey, décerné chaque année à l'officier supérieur le moins apprécié. Cette attribution se matérialise par une disparition du buste du général Baraguey qui trône au bout du couloir dit « de la pompe » et qui réapparaît dans le bureau du cadre, au moment voulu.

Œuvre : Précisions - buste, Le Maréchal Baraguey d'Hilliers | Espace  WebMuséo Musenor

On comprendra, pour finir, que ce livre n'est pas la transcription d'une "aventure romantique à même de s'adresser à un public le plus large", ni une caricature des militaires. C'est à mon sens une bonne réponse à des propos du général Lecointre, ancien CEMA, estimant qu'hommes politiques et journalistes ne connaissent pas le coeur des Armées: il est temps de cesser de croire que seul le praticien militaire est en mesure de comprendre parfaitement l'Institution militaire et il est urgent de laisser l'ethnographe "éclairer cet univers singulier".

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L'autre ouvrage est titré: "Du sens de l'action" (256 pages, 22,90€), Paru au cours de l'été, il rassemble une quinzaine de témoignages de saint-cyriens 15 ans après leur passage à "Coët". Tous sont issus de la même section (surnommé "4e verre pilé") d'une promotion de Saint-Cyr, la promotion Chef de bataillon Segretain, 2006-2009). 

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La plupart sont encore dans l'Institution mais pas tous. Certains (deux) ont choisi d'autres voies civiles sans pour autant renier le creuset de l'ESM: "Partir n'est pas trahir", dit l'un d'eux.

Qu'on ne cherche pas dans ces 256 pages des récits enflammés et dynamiques de militaires exaltés par la première partie de leur carrière. Ce sont les réflexions de garçons qui ont eu le "souci de penser simplement et utilement plutôt qu'autrement".

Ya Rab Yeshua.

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